Hello there ! Ici Draignaell qui vient en ces lieux pour vous parler d’une nouvelle pièce de théâtre que j’ai eu la chance de voir pendant l’année :
Pavillon Noir
Pavillon Noir est une pièce écrite par les collectifs Traverse et OS’O et interprétée et mise en scène par ce dernier. Durant ses 2h15, elle aborde des thématiques contemporaines, concernant principalement Internet au travers de cinq histoires et plusieurs scénettes se croisant.
Résumé –
Pavillon Noir est un spectacle contemporain, mêlant différentes histoires, en différents lieux et aux personnages divers.
Dès l’ouverture du spectacle, une oratrice vient nous demander d’éteindre nos téléphones, batterie dans une poche, coque dans l’autre, expliquant que Big Brother est déjà parmis nous via ces appareils mais… elle est sans cesse interrompue par un troll des temps modernes, criant de nombreuses références à la pop-culture du net et à ses mêmes (élément ou phénomène repris et partagé en masse sur la toile).
La première histoire met en scène une réunion d’un groupe de sept hackeurs. A l’ordre du jour, le cas de Ania Gavrilin, une étudiante à la tête du site SciUp, ayant hacké Welcome Science, un éditeur en ligne payant spécialisé dans la publication d’articles scientifiques aux revenus annuel de 3 milliard de dollars. Ils décident de l’aider à fuir son pays afin de ne pas finir devant la justice américaine. Le plan est de récupérer de l’argent virtuel – des BitCoins – en rançonnant des gens en trouvant le moyen d’exploiter leurs métadonnées, et ainsi payer un vol vers la Russie à Ania.
Le 13 Novembre 2015, la nuit des attentats du Bataclan de Paris, deux amis (ou amants ?) – Candice et Gwénaël – attendent des nouvelles de leur compagnon, qui était à Paris ce jour là. Tous trois sont des activistes écologiques, et ce dernier était alors présent à la contre-COP 21. Quelques jours après son retour à Rennes, chez eux, a lieu une descente policière. Ils ne trouvent rien mais au vue des accusations dont eux-même n’ont pas vraiment connaissance, ils sont assignés à résidence, avec l’obligation de pointer 3 fois par jour à la préfecture de la ville.
Années 2013 & 2014, Syrie, Elias et Reem forment un jeune couple, bien décidé à vivre et à lutter pour le droit à la culture à l’internet libre dans un pays où la liberté est toute relative. Elias travaille avec d’autres à recréer une version digitale de la ville de Palmyre, afin que tout le monde puisse la visiter gratuitement depuis leur ordinateur, et sauver la culture de leur pays. Mais il va être arrêté, et ne sortira jamais de prison. Son crime ? Avoir montré à des gens comment se servir d’Internet sans être tracé.
13 Février 2015. Jour de procès à New York. Celui d’un hacker – David Joshua Hartmann – responsable du site la Route de la Soie, un site de vente de drogue. Mais le jugement se retrouve subitement attaqué par de réels pirates des temps anciens.
Entre ces différentes histoires, des courtes scénettes, parodiant de jeunes youtubeurs. Le public assiste à des explications sur un ton humoristique à propos de ce que sont les Bitcoins, les métadonnées et le vocabulaire d’Internet.
Ainsi, les thèmes abordés sont nombreux : Internet et ses médias, le piratage informatique, la surveillance de l’état, la liberté, les attentats, le militantisme pour l’écologie, la liberté de parole, du net, pour la protection de la culture, etc. Ils touchent tous d’une manière ou d’une autre notre présent et ces enjeux
Mise en scène –
Le décor était sobre. Trois panneaux servant parfois de fenêtres, de murs ou de décors virtuels. Un canapé-lit changé en fonction de la scène, surtout utilisé dans les moments se passant dans la réalité, marquant la différence des lieux. Un large carré aux bord lumineux en bas, marquant la limite de la scène; un plus petit composé de néons en hauteur, la couleur changeant en fonction de la scène.
Exemple de deux mise en scène différentes :
À plusieurs moments, de la musique intervient, intra-diégétique, accompagnant la situation, posant une ambiance ou servant de transition. Elle est généralement électronique et remplie de synthétiseurs, et glisse parfois dans un style plus rock, voire post-rock.
ET ATTENTION SPOILER !
Je révèle dans le paragraphe suivant des éléments importants de l’intrigue, survolez le si jamais vous préférez vous garder la surprise des évènements !
Le style est très différent en fonction de la scène et du moment où l’on se situe dans telle ou telle histoire. Alors que les scénettes parodiant les jeunes vidéastes sont très portées humour, d’autre sont plus sombres, plus dans l’angoisse – comme lorsque Gwénaël ou Candice attendent des nouvelles de leur ami qui était à Paris lors des attentats, ou quand l’un des sept hackers se fait arrêter et que les autres l’apprennent – et certaines sont même vraiment dramatiques, notamment les scènes où Reem vient rendre visite à Elias en prison.
Tout en parlant d’Internet et des nouveaux médias, aucun appareil électronique n’est employé sur les planches. Toutes les scènes ayant un rapport avec les sept hackers se passent dans une réalité virtuelle : quelque part dans le “deep-web”, sur un site en particulier ou dans les systèmes de sécurité d’un aéroport par exemple. Et même sans utilisation de téléphone ni d’ordinateur, tout est clair.
Par exemple, la photo ci-contre se passe quelque part dans une réalité virtuelle, dans un monde informatique, et deux hackers sont en train d’éliminer les métadonnées qui pourrait permettre aux autorités américaines de retrouver Ania Gavrilin.
Mon regard de spectateur –
Que cela soit ce tour de force que de réussir à mettre sur les planches des scènes se déroulant dans un univers informatique, et ce d’une telle manière – ressemblant à la foi à la réalité et à un jeu vidéo -, ou encore les musiques que j’ai beaucoup aimé, les thèmes dont je suis pour certains très proche et les différentes histoires qui m’ont toutes touchées d’une façon ou d’une autre, ce spectacle est pour moi une vraie réussite.
En si peu de temps, j’ai réussi à m’attacher aux personnages, qui nous sont souvent assez semblables car vivants dans notre époque et dans un quotidien similaire au nôtre. Et en si peu de temps j’ai pu être touchée par ce qui leur arrivait. Sans compter les comédien·nes, tous étaient vraiment excellents dans leur jeu.
ET ATTENTION SPOILER !
Je révèle une nouvelle fois dans le paragraphe qui arrive des éléments de l’intrigue, comme tout à l’heure, survolez si vous voulez éviter de vous gâcher la surprise.
Les moments d’humour et de drame étaient parfaitement dosés. Le spectacle, commençant tranquillement et de manière particulièrement drôle, présentait des situations de plus en plus angoissantes, jusqu’à la toute fin, lors de la scène où les hackeurs, plus que six, doivent faire passer Ania Gavrilin par l’aéroport sans qu’elle ne soit arrêtée. Seule scène se passant à la fois dans la réalité, et dans le virtuel, c’est toute une lente montée en puissance qui s’arrête brutalement et nous laisse cloué au siège.
C’est aussi tout un spectacle qui a en plus un côté informatif, expliquant au spectateur peu habitué le vocabulaire et le fonctionnement d’une certaine partie du web. Il nous amène également vers une réflexion, sur le bien ou le mal du piratage informatique – entre circuit de drogue et accès gratuit à la culture et l’éducation -, ou encore sur notre liberté, ce que nous en laisse les états d’occident et d’orient, entre anti-terrorisme et surveillance abusive.
Pour résumer, Pavillon Noir est sans nul doute mon coup de cœur de 2018. C’est une des pièces que j’ai le plus aimé en deux ans de théâtre, et probablement une de celle qui m’a le plus marquée.
Crédits –
auteurs Adrien Cornaggia, Riad Gahmi, Kevin Keiss, Julie Ménard, Pauline Peyrade, Pauline Ribat & Yann Verburgh
acteurs Jérémy Barbier d’Hiver, Moustafa Benaïbout, Roxane Brumachon, Bess Davies, Mathieu Ehrhard, Marion Lambert & Tom Linton
vigie/coordination artistique Cyrielle Bloy & Baptiste Girard
scénographie Ingrid Pettigrew
lumières Jérémie Papin
costumes Aude Désigaux
maquillage & coiffure Carole Anquetil
musique Martin Hennart
photo Frédéric Desmures
régie générale Emmanuel Bassibé
régisseur son Sébastien Batanis
régisseur lumières Stéphane Le Sauce
production Fabienne Signat
diffusion Emmanuelle Paoletti
production déléguée le Collectif OS’O
coproductions Gallia théâtre – scène conventionnée de Saintes ; le Fonds de dotation du Quartz de Brest ; le TnBA – Théâtre national de Bordeaux Aquitaine ; LE CENTQUATRE-PARIS; le Centre dramatique national de Normandie – Rouen ; Le Canal Théâtre du Pays de Redon – scène conventionnée pour le théâtre ; le Centre dramatique national de Tours – Théâtre Olympia ; le phénix scène nationale Valenciennes, dans le cadre du CAMPUS, Pôle européen de création ; la scène nationale d’Aubusson ; la Scène nationale du Sud-Aquitain – Théâtre de Bayonne ; les Treize Arches – scène conventionnée de Brive ; Carré-Colonnes, scène cosmopolitaine Saint Médard en Jalles /Blanquefort ; Théâtre Roger Barat – Ville d’Herblay ; Théâtre de Saint-Quentin-en-Yvelines, Scène nationale ; l’OARA – Office Artistique de la Région Nouvelle-Aquitaine ; l’IDDAC – Institut Départemental de Développement Artistique et Culturel – Agence culturelle de la Gironde.